Zoom cadre Louis XIV

Encadrer ou le jeu des apparences trompeuses

Attention ! Encadrer n’est pas une chose simple. Rien n’est plus trompeur. L’encadrement demande aussi une recherche de style. Tentons de cerner le débat…

Zut ! J’ai oublié de laisser un espace… Contrairement à ce que l’on croit souvent, il faut des années de pratique pour bien encadrer. La découpe, l’ajustage, l’accrochage multiplient les problèmes en cascade.

Si vous tentez de réaliser des travaux simples, n’oubliez pas que vous rencontrerez beaucoup plus de choses à ne pas faire, que de choses à faire. Des livres traitent de la question (voir encadré ci-contre), mais dans tous les cas, armez-vous de patience. Encadreur est un véritable métier pour lequel il existe une formation professionnelle.

Vous trouverez des centaines d’encadreurs dans toute la France. La plupart des travaux qu’ils proposent se situe dans une fourchette allant de 400 euros à 2 000 euros, pour une peinture.

Certains tableaux médiocres sont d’ailleurs achetés uniquement pour leur cadre trop beau.

Choisir un cadre ancien

Un cadre ancien sera rarement à la dimension de la peinture ou du dessin que vous souhaiterez y mettre. La retouche (l’ajustage) par un homme de métier peut coûter aussi cher que la pose d’un cadre neuf, voire davantage. Sans parler d’éventuels travaux de dorure… A partir du XIXème siècle le cadre moulé en plâtre remplace celui en bois sculpté. L’aspect extérieur peut cependant être très semblable. Comme les meubles, les cadres suivent les grandes périodes stylistiques comme par exemple le Louis XIV, le Louis XVI, l’Art nouveau, l’Art déco, etc. Certains se plaisent à mettre un tableau ancien dans un cadre moderne. L’on peut reconnaître la période de fabrication, comme pour un meuble, par les techniques de fabrication employées, les matériaux utilisés, le vieillissement, l’allure générale, le style…

Cadre En Bois Sculpté Doré d’époque Louis XVI

La valeur du cadre en lui-même va dépendre de plusieurs critères : son état de conservation, sa rareté, son modèle, sa qualité globale d’exécution, sa sculpture vigoureuse, sa reparure, sa dorure (ou son argenture), son format, son support (bois de chêne, tilleul ou bois tendre), sa signature, ses transformations… On distingue aussi le cadre sculpté du cadre mouluré ; ce dernier a moins de valeur, toutes choses étant égales. Jusqu’au début du XVIIIe siècle, les cadres étaient presque toujours sculptés.

Le bois ne doit pas être piqué ou peu. Un cadre en chêne sculpté est plus coté qu’un cadre exécuté en tilleul ou dans un bois tendre. Sur les beaux cadres en chêne sculpté, l’on cherchera la présence éventuelle d’une estampille, car certains modèles étaient exécutés par des maîtres ébénistes. À la suite de leur nom, on trouve parfois les lettres JME (Juré Maître Ébéniste). Parmi les plus réputés dans la spécialité, citons : Étienne-Louis Infroit, L. Boussard, Georges Heine, T.S. Vasseru, P. Levert, Louvez, Pépin. Ces estampilles apportent une plus-value.

On préférera une dorure d’origine d’une grande fraîcheur, sans reprises ni masticages. La rareté, le format, le modèle, sa forme, sa richesse, son originalité sont aussi importants. La vivacité, la diversité et la générosité de la sculpture jouent également un rôle important dans la fixation du prix.

Une affaire de style

Quelques règles s’appliquent aussi quant au choix du modèle de cadre. En principe le cadre ne doit pas étouffer la peinture, le dessin ou la gravure qu’il est censé servir. Classiquement on fait correspondre le cadre avec l’époque à laquelle remonte l’œuvre.

Souvent, les cadres suivent les styles historiques des arts décoratifs, dans les grandes lignes, et avec diverses particularités. Ainsi, un cadre Louis XVI aux lignes bien droites et ne se confondra avec un baroque. Les Flamands et les Hollandais ont créé au XVIème siècle un type de cadre encore fréquemment utilisé de nos jours pour des peintures de ces contrées. Ils présentent un large bord noir (en ébène ou en bois noirci).

Cadre à profil renversé en bois mouluré et noirci. Pays-Bas, XIXe siècle. Dim. : 34 x 42 x 11 cm.

La mode vient souvent des grands musées et expositions, ainsi que des collectionneurs importants. La tendance actuelle est plutôt à la sobriété, avec des murs moins surchargés qu’autrefois et surtout des cadres plus discrets.

Le rôle que doit jouer le cadre par rapport à l’œuvre est un vieux débat qui confine à la philosophie. Nous ne l’aborderons pas. Sachons cependant que déjà à la Renaissance, époque où l’art de l’encadrement est apparu avec la peinture sur chevalet, on n’hésitait pas parfois à utiliser des cadres très travaillés. Le musée des Offices, à Florence, en garde des témoignages.

Cadre à profil renversé en bois sculpté noirci, doré et laqué rouge. Les coins et les milieux à décrochés à décor d’agrafes d’acanthe et fleurettes la feuillure à tors de laurier. Espagne, XVIIe siècle. Dim. : 35 x 26 x 13 cm.

Pour les miroirs, le débat n’a guère lieu d’être. Ici, le cadre apparaît souvent comme plus important que le néant qu’il entoure. On ne s’étonnera pas que l’encadrement des miroirs témoigne parfois d’une grande imagination. Alors, la présentation formelle surpasse le contenu (le miroir). Le cadre est donc bien de l’art.

Encadrés

Différence entre cadre et cadre baguette

C’est une question de procédé de fabrication. Un cadre baguette est obtenu en découpant et assemblant une longue baguette déjà mouluré pour ensuite former le cadre. En revanche, le cadre, au sens strict est assemblé puis sculpté, mouluré, doré ; ce qui permet de mieux cacher les raccords aux angles et de varier sa décoration.

Faux et transformations

Mentionnons un dernier avertissement : sur le marché actuel, il existe de nombreux cadres copiés qui sont réalisés en résine moulée !

On fera attention à certaines transformations opérées dans le passé sur les cadres, transformations qui les dévaluent.

Lire

Le Plaisir d’encadrer comme un professionnel, Par Lily Becker-Massart, Fleurus Idées

Techniques de l’Encadrement, Par Robert Cunning, Eyrolles Editions

L’Encadrement : techniques et secrets, Par Michèle Dautet, Edition Dessain et Toira

Le saviez-vous ?

Il existe des gens qui collectionnent les cadres (sans les peintures).

Quelques tendances dans les prix

Parmi les critères de valeur, nous trouvons : les dimensions, l’ancienneté, la décoration sculptée ou simplement moulurée (en général les exemplaires XVIIIe siècle sont sculptés et ceux du XIXe fréquemment moulurés), l’état de conservation, la qualité des bois… Toute choses étant égales, le cadre est généralement plus coté que le cadre baguette.

La majorité des modèles se négocient entre 300 et 500 euros, même si la fourchette des prix s’étend de 100 euros à 10 000 euros.

Un encadrement simple à baguettes du XIXe siècle peut se négocier à 50 euros.

– Un cadre d’époque Louis-Philippe en bois noirci ne dépasse pas 100 euros.

– Comptez 150 à 200 euros pour un modèle en stuc du XIXe siècle. En général, le stuc est moins cher que le bois, comme les modèles moulurés (du XIXe siècle) sont moins chers que les sculptés du XVIIIe.

– Prévoyez 3 000 euros pour un cadre Louis XIV ou un modèle à cassetta italien du XVIIIe siècle.