BAMBOU gravé appelé kārè e tā Culture kanak, Nouvelle Calédonie Fin du XIXème - début du XXème siècle Bambou H. : 94 ; Diam.: 3 cm (fente ancienne)
Long de deux entre-nœuds, ce bambou est gravé de nombreux registres à sens de lecture différent et est animé de figures et d’objets. On dénombre notamment un cavalier, des hommes à pied, une rangé de fusils et des rames.
Lorsque l'homme appose ses premières marques sur un bambou, celui-ci est encore vert. La pigmentation noire est quant à elle obtenue grâce à la suie ou l'huile de la noix de bancoule.
Supports mnémoniques, ces objets qui étaient tout d'abord employés comme bâtons de voyage garnis de plantes protectrices, devenaient une fois gravés, source d'apprentissage renvoyant aux mythes, aux traditions ou encore aux événements marquants de la culture Kanak. Le premier quart du XXème siècle voit s'éteindre la réalisation de ces bambous gravés - moment où la culture orale laisse la place à la transmission écrite.
« Selon le missionnaire et ethnologue français Maurice Leenhardt (1937 : 110), lorsque les Kanak s’aventuraient hors de leur village, ils portaient avec eux un bambou gravé qu’ils utilisaient comme viatique pour se protéger des dangers de la route. Des herbes magiques, censées assurer protection, y étaient enfermées. Les vieux le portaient en guise de bâton et à travers ses dessins, redisaient en les expliquant les hauts faits ou les malheurs des ancêtres (Lambert, 1900 : 67-68). Pour leurs détenteurs, ces objets étaient aussi des aide-mémoires visuels, des supports destinés à rappeler un événement important (Vieillard et Deplanche, 1862-1863), comme des rouleaux pour inscrire leurs « […] impressions les plus vives pour les faire partager à d’autres » (Leenhardt, 1937 : 111). » Propos de Roberta Colombo Dougoud, « Les bambous gravés, objets ambassadeurs de la culture kanak », Journal de la Société des Océanistes, 136-137 | 2013, 119-132.